Journal d’une Camgirl #406 – En transition

Précédemment dans le journal d’une camgirl : j’ai passé le mois de juin 2017 à courir d’un rendez-vous à un autre, avançant sur le documentaire pour Revue Far Ouest et dans la préparation de mon premier tournage.

Encore une fois, je me retrouve dans un avion pour me rendre à un festival. Pendant le trajet, je réfléchis à mon show webcam de mercredi dernier. C’était hyper étrange, j’avais pas du tout l’impression de faire un show classique. J’ai mis longtemps à comprendre pourquoi. En fait, j’ai passé le show à répondre à des questions sur mon blog, sur le documentaire, sur le Tag. Des gens venaient pour « découvrir la webcam », ou parce qu’ils lisent le blog qui a déjà 3 ans. Du coup je me retrouve de plus en plus souvent face à un public de curieux, qui n’est pas là pour participer au show, mais juste « pour voir ». Et ça signifie : pas de pourboires, pas de demandes. Résultat il ne se passe rien.

En fait, on ne vient plus me voir en tant que camgirl, mais en tant qu’autrice militante, ou je sais pas trop quoi. Je m’interroge sur l’avenir que j’ai encore sur Chaturbate. Parfois je me dis si j’avais gardé mon pseudo de camgirl secret, j’aurais peut-être pas eu ce problème.

Bref. Le programme du week-end est le What the F* Fest ! à Paris. C’est un festival organisé par floZif et Marianne Chargois, que j’ai rencontrée à Montpellier lors du « Explicit Festival » en novembre dernier. Il se déroule sur une journée, et je vais avoir la chance de la passer avec Viviane de la Fête du Slip que j’ai elle aussi rencontrée à Montpellier. Le monde du porno est décidément petit, mais je dois avouer que ça me fait plaisir de croiser toujours les mêmes têtes, d’événement en événement, comme quand on retrouve sa famille à Noël, aux anniversaires, etc. (mais sans les oncles gênants). Arrivée à Paris, je fais mon habituel passage aux bureaux du Tag pour voir le chef, puis direction le bar pour retrouver Laé et y rejoindre Viviane : tant qu’à faire autant profiter un peu.

Le samedi, je me prépare pour le What the F* avec Viviane, et, fait assez rare pour être noté, je me trouve canon. J’ai l’impression d’avoir enfin le look dont je rêvais plus jeune, avec des cheveux roses (la faute à Gwen Stefani), un piercing et une certaine maîtrise du maquillage (merci les tutos YouTube). Le rouge à lèvres que m’a prêté Viviane est absolument parfait, et en plus, Parker a liké mon selfie sur Twitter. Clairement une bonne journée qui commence.

C’est donc mon quatrième festival de porn cette saison, après Berlin, Montpellier et Lausanne. Je visionne encore des courts-métrages super intéressants, réalisés par des personnes du monde entier. Je me rends compte que malgré ma connaissance pourtant assez étendue du porno, je n’avais même pas idée que cette scène était si bouillonnante d’idées et d’énergie. Ce qui est d’autant plus intéressant c’est que ça me sort de ma zone de confort, puisque ça balance tous les styles et les tags différents : du blood play (jeux avec aiguilles ou sang), et de l’uro, des cordes, du BDSM… Sans compter qu’il y a également des performances vivantes, qui est un art auquel je me suis très rarement confrontée. J’ai l’impression d’apprendre, de découvrir et en bonus je passe un bon moment.

Voilà, l’année « scolaire » est terminée. C’est l’été, je traîne un peu à Paris pour une fois. J’ai eu le temps de rencontrer Marie Trayolp pour une séance photo, le dimanche. Je vais voir des amis, notamment Britney Fierce, car j’adore son appartement et j’ai très envie de l’utiliser comme décor pour un film. Plus tard, je rejoins Pippo à Bercy (enfin… l’Accor Hotel Arena il paraît) pour le concert des Foo Fighters.

C’est vraiment « deux salles, deux ambiances » par rapport au festival, et je me retrouve encore à réfléchir à ma position « le cul entre deux chaises » où j’ai toujours un pied dans un monde, un pied dans l’autre : un boulot « normal », mon boulot dans le porno; un festival de métal un peu mascu, un festival queer; des potes féministes militant·es, des potes qui comprennent pas qu’on dit pas « pédé » quand quelqu’un boit pas d’alcool… Pas toujours évident de naviguer, mais je pense qu’on est pas près de tous cohabiter tranquillement, donc je fais avec.

De retour à Toulouse, je me remets au boulot. J’essaie d’organiser l’été qui risque d’être assez peu reposant. Je relance Parker pour fixer une date pour notre tournage, et il tarde à répondre. En attendant, je commence à noter des idées pour faire mes propres films aussi, car maintenant que je me suis lancée dans ce projet un peu foufou, j’ai le cerveau qui bouillonne en permanence. Ma première idée est peut-être un peu complexe, mais je n’arrive pas à m’en défaire : je pense sans cesse à un reverse gang-bang (plusieurs femmes sur un homme), et je me dis que Parker serait parfait pour ça. Je lui en ai parlé lors de notre dernier Skype et il est super chaud. Je cherche déjà des endroits où tourner à Paris, les filles qui seraient bien dans le rôle, j’imagine la scène et comment elle se déroulerait. J’ai déjà le film dans ma tête en fait. Un plot twist, des punchlines un peu féministes. Rien que d’y penser j’ai tellement hâte de le réaliser !

Je continue de recevoir des mails de personnes qui veulent travailler avec moi, dont beaucoup m’intéressent. Mais dans le tas, il y a aussi des candidats qui n’ont pas l’air d’avoir compris ce que je voulais faire : des mecs qui veulent tourner cagoulés, d’autres qui ont déjà de l’expérience mais pile avec les productions que j’ai absolument envie d’éviter. Et d’ailleurs, comme pour me confirmer tout ça, un matin de juillet, un des plus gros comptes du porno français décide de m’insulter sur Twitter après un tweet où je critiquais leur manque d’élégance habituel en réaction à l’actualité. Ils sont allés rechercher un de mes shows webcam piraté pour en faire une capture d’écran et la publier sur leur compte public en commentant « Si t’as une audience pour ça tant mieux ». Je suis estomaquée par le tweet, et je pense immédiatement à appeler un huissier pour porter plainte, mais bien entendu le tweet a été supprimé à peine quelques minutes après.

Capture d’écran du tweet

Enfin, j’ai pas le temps de m’attarder sur ces bêtises, je dois bosser sur un mood board pour le film. Comme souvent j’avais pensé tout faire à l’arrache, mais c’était sans compter sur Parker qui, lui, prévoit tout dans le détail. Du coup j’ai pas trop le choix, et je dois préparer un truc un peu carré. J’ai l’impression d’être à l’école, et de devoir tout apprendre en 5 minutes. C’est un peu le cas en fait. J’ai à peine commencé à prendre des photos il y a un an, et je fais surtout des paysages. C’est pour ça que dès que je peux, je m’entraîne, pour maîtriser ma caméra. J’ai fait plein de photos de ma famille quand je suis allée les voir. Ils pensent que je me suis découvert une passion pour la photo.

Fin juillet, je reçois enfin des nouvelles de Parker. On cherche une date pour tourner, je lui dis que j’ai des vacances fin août. Par contre, on s’était mal compris sur un point… et pas le moindre. En fait, j’avais pas du tout intégré qu’il voulait tourner deux films en une fois. Je m’étais préparée pour tourner dans le sien surtout, et bosser sur mon projet en parallèle, puis le faire venir à Paris quand je serai prête. Mais apparemment c’est pas le plan. On va donc se voir à Berlin pour tourner deux vidéos, un de ses projets et un des miens. La date est choisie. Ce sera le 30 août.

Bordel.
J’ai rien de prêt.
Et c’est dans un mois.

Photo en une : Marie Trayolp

La suite au prochain épisode…

5 réflexions sur “Journal d’une Camgirl #406 – En transition

  1. Passionnant, ton journal.
    Et très bien raconté,
    très nature et très sincère.
    Très agréable à lire.
    J’aime.
    Ce rouge à lèvres te vas à merveille.
    As-tu réussi à faire ce « gang-bang » filles sur un seul mec?
    et surtout à Paris qui t’inspire.

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