Mercure

Une chambre d’hôtel vide et impersonnelle.

Je défais mon sac. J’ai une heure pour me préparer. Je viens d’arriver à Bordeaux pour une courte intervention à l’école de journalisme. Comme souvent, je ne serai pas rémunérée. Je viens donner mon temps, mes compétences et mon savoir. Je viens éduquer les jeunes étudiants, ceux qui écriront les articles de presse sur nous dans quelques années. Je viens militer pour mes droits et ceux de mes collègues.

Je repense à la phrase moqueuse qu’a prononcée une amie il y a quelques jours devant mon désespoir, alors qu’elle m’annonçait avoir signé une grosse mission en tant que consultante. « Hé oui, mais toi tu as choisi de militer, donc d’être pauvre. »

Je hausse les épaules en me regardant dans le miroir de la salle de bain du Mercure. Au moins je suis défrayée cette fois. C’est d’ailleurs pour ça que j’ai choisi un hôtel un peu élégant. J’aurais pu prendre moins cher, moins confortable (pourquoi cependant ?), mais je voulais un endroit joli. Je voulais en profiter pour faire quelques images pour alimenter mes pages payantes. Pour « créer du contenu », puisque c’est comme ça qu’on dit maintenant.

Il est vingt-trois heures quand je rentre de la conférence et du dîner. C’était rafraichissant de parler de mon travail sous un angle nouveau. Le rapport aux media, les points communs avec les autres travailleurs de l’ombre, ceux dont le métier est dévalorisé. Les questions et les échanges avec le public étaient enrichissantes. Tout s’est bien passé. Je suis fatiguée. J’ai mal au ventre. Mon train repart tôt demain matin. J’ai du retard dans mon travail.

La douche et le lit confortable m’appellent.

Je me regarde dans le miroir un coton à la main. Mon maquillage est bien réussi aujourd’hui. La GoPro posée sur la table de chevet me nargue de loin. Je soupire. J’enlève ma robe, mes grosses chaussettes, ma culotte en coton. J’enfile des bas noirs avec jarretière en dentelle. Je pose la caméra face au lit. Je fais des photos de moi, sous tous les angles, des gros plans sur mon cul, sur ma chatte, mes pieds. J’enchaîne avec une courte vidéo de cinq minutes où je me caresse sur les draps immaculés. Encore quelques clichés sous un autre angle, puis je retourne fouiller dans le tas de lingerie un peu aléatoire que j’avais fourré dans mon sac. Il y a une paire de collants en nylon fin, couleur chair. Je pose la GoPro à un autre endroit, et je m’installe face à elle. J’enfile mes collants en regardant la caméra, je les ajuste pour que la couture soit bien placée au milieu. Je me caresse doucement face à l’objectif.

Soudain, j’étouffe un petit rire. C’est en train de m’exciter vraiment. Je me laisse encore surprendre quand ça arrive. Mais le nylon, c’est mon pêché mignon… Je sors rarement sans culotte « dans la vraie vie », sauf parfois quand je porte des collants. Le frottement de la matière sur mes fesses nues et mon clitoris, le crissement quand je croise les jambes. La fine barrière derrière laquelle on peut tout voir, tout sentir… et le plaisir coupable quand quelqu’un les déchire avec urgence pour plonger dans ma chatte.

Sur l’écran de retour de la GoPro, je vois mes jambes enveloppées dans le nylon et ma chatte au milieu, visiblement trempée. Je glisse ma main dans le collant. Pas besoin de faire semblant aujourd’hui. Je ne joue pas la comédie. Je me filme en train de me caresser par dessus le nylon, puis par dessous, en vue de près puis de plus loin… Le chronomètre atteint les dix minutes. Ça suffira. Je coupe l’enregistrement.

Je regarde le plafond pendant quelques minutes. C’est bon, j’ai rentabilisé la chambre. Je jette un oeil aux images et j’en choisis trois à poster tout de suite. Je range le matériel. J’enlève le collant. Je me démaquille et je file enfin sous la douche. Le gel douche de l’hôtel sent bon le miel. La journée est vraiment finie cette fois.

J’enfile un vieux tee-shirt et un gros pull. Je remets mes chaussettes. J’ai froid. J’ai toujours mal au ventre. Je fais la liste mentalement de tous les mails que je dois écrire demain. Je me recroqueville sous la couette. L’excitation causée par le nylon est encore là, je la sens entre mes jambes. Je glisse mes doigts vers mon sexe trempé. Mes pensées dérivent instantanément vers une autre nuit, une autre chambre d’hôtel, un autre collant, qui a fini déchiré celui-là. Je fais durer mon plaisir un petit peu.

Je jouis, seule, en silence. Il y a des choses qu’il faut savoir garder pour soi.

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